Démographie et PIB par habitant

J’ai fait un chapitre complet dans mon livre sur l’IPV sur la démographie, même si l’analyse ne fournissant aucune information pour le calcul de l’IPV lui-même. La population humaine a bondi pendant ma vie d’environ 2 milliards de personnes à aujourd’hui plus de 7 milliards; au Québec, c’est à peu près la même chose, toutes proportions gardées. Les énormes défis associés à la projection de cette tendance vers peut-être 9 milliards de personnes en 2050 dominent les perspectives pour notre avenir.

Dans le dernier numéro de L’actualité, Pierre Fortin, qui y est chroniqueur depuis 1999 reconnu pour ses capacités de vulgarisation des enjeux économiques, fournit un texte intéressant par sa clarté sur l’information différente fournie par le PIB et par le PIB par habitant. Le texte s’intitule «L’illusion démographique», je crois pour souligner que le rôle de la démographie dans le calcul du PIB constitue une sorte d’illusion quant à sa valeur comme indicateur; c’est du moins un message important de l’article. Le magazine ne fournit pas l’accès aux articles des numéros en kiosque, et je ne puis fournir un lien pour cette chronique récente. Suite à un contact, Pierre Fortin m’a rappelé une autre chronique sur ce thème qu’il a produite en janvier dernier, en prenant le cas du Japon comme exemple : «Pourquoi l’économie japonaise a-t-elle ralenti depuis 25 ans?» Il est en effet aussi intéressant et m’amène à la même réflexion.

L’objectif de la récente chronique, tout comme celui de la chronique sur le Japon : «Gare aux idées reçues! Depuis 15 ans, les Japonais sont devenus beaucoup plus efficaces au travail que les Américains. Idem pour le Québec par rapport à l’Ontario», cela en dépit de nombreux reportages qui suggèrent le contraire. Clé de la confusion : c’est le PIB par habitant qui importe pas mal plus que le PIB tout court pour voir la situation d’une société, d’une économie. Comme dit Fortin, «La croissance du PIB est une bien mauvaise mesure de la performance économique.»

PIB per capita graphique

 

Dans la chronique de janvier, Fortin fournit plusieurs exemples de ce qu’il appelle «le gros bon sens». Après une période frénétique de croissance en termes absolus (qu’il associe à des pays qui «rattrapent» d’autres qui les devancent, comme le Japon a rattrapé les États-Unis, comme la Chine le fait aujourd’hui), la croissance a tendance à diminuer, voire à plafonner. (suite…)

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Le développement économique : un jeu qui nous piège

Aperçu Le Conseil du patronat du Québec entreprend depuis septembre un effort de convaincre les Québécois du bien fondé de notre modèle économique et, surtout, de la «création de richesse» comme «priorité absolue». Alain Dubuc en rajoute en insistant qu’il s’agit d’une «absolue nécessité». La campagne de promotion du CPQ est fondée sur le développement économique et une comparaison avec d’autres juridictions, cela en fonction du PIB per capita. L’effort est donc compromis dès le départ, et cela presque de l’aveu du CPQ. Plusieurs intervenants québécois cherchent à moduler l’impact de cette recherche de richesse trop limitée dans sa conception, mais se butent aux règles de jeu qui ne reconnaissent pas de telles modulations. Finalement, nous sommes bon nombre à être déjà riches, et l’objectif doit être non pas la création de richesse dans la tradition myope du CPQ mais la recherche d’un modèle qui ne comporte pas de façon structurelles les inégalités qui laissent tant de monde dans la pauvreté même s’ils sont entourés de richesse.

Tout récemment, en échangeant avec des amis, je me trouvais presque surpris à intervenir pour souligner que nous – nous de la classe moyenne – sommes des riches. L’échange portait sur ces autres du 1%, les vrais (?) riches, mais a abouti pour moi à cet autre constat. Ce sont carrément des lieux communs que de noter qu’il n’y a pas de limites identifiables à la quête de la richesse matérielle. Les analyses de notre surconsommation se fondent sur le piège que constitue notre sens que le bonheur est à associer à notre accumulation de biens matériels, même si ceci est dans un sens élargi. Pourtant, nous sommes nombreux dans les sociétés riches à en avoir assez.

Cette première surprise était assez rapidement associée à une autre, à la lecture d’une chronique d’Alain Dubuc du 18 février portant sur «cinq questions pour la prospérité». La chronique part du rapport du Conseil du patronat (CPQ) sur la prospérité du Québec publié en septembre 2014 et de la campagne lancée les 16 et 17 février par le CPQ pour promouvoir la prospérité Dubuc dit au début: «je peux difficilement être contre. Depuis des années, le thème sur lequel j’ai le plus travaillé, c’est celui de la création de richesse, un autre terme pour décrire la même chose: l’absolue nécessité pour le Québec de travailler pour augmenter son niveau de vie.» De mon coté, je ne puis être contre la recherche de la prospérité non plus, ayant consacré mon livre de 2011 sur la question, en utilisant le terme «progrès» pour essayer quand même d’éviter de la confusion. Ma surprise était de voir Dubuc poursuivre dans ce que je constate plus clairement maintenant être révélateur. Il y a une «absolue nécessité», dit-il, d’augmenter notre niveau de vie et d’atteindre «notre plein potentiel».

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La liberté d’expression ou la mort?

Petit interlude philosophique à travers le suivi de l’actualité… Récemment, j’ai été invité à écrire sur l’humanisme dans ses relations avec les enjeux environnementaux. Cela à abouti à une longue réflexion que je publie ailleurs sur ce site parce qu’il ne réjouit pas mon contact, qui ne le publiera pas, ainsi qu’à un texte beaucoup plus court soumis au Devoir de philo du journal Le Devoir. Il ne semble pas avoir été retenu pour publication, et je me permets donc de le présenter ici.

En 2012, j’ai participé à un panel avec, entre autres, le directeur d’un institut de recherche québécois. En réaction à une intervention de ma part qui soulignait l’énorme importance des enjeux démographiques, et de la décision de la Chine d’agir pour freiner la croissance de sa population, il a indiqué (après, et non publiquement) qu’il avait de grandes réticences à intervernir dans les questions touchant la reproduction humaine. Dans le cas de la Chine, la loi d’un seul enfant, adoptée en 1978, a permis d’éviter l’ajout d’entre 300 et 400 millions de personnes humaines à la population chinoise depuis 35 ans, alors que le pays est déjà surpeuplé, mais cela s’est fait par une atteinte importante à la liberté des personnes.

Terre vue de Lune

 

En 2013, j’ai donné une entrevue portant sur les grandes lignes de ma carrière en environnement et développement. J’ai terminé en faisant référence encore à la situation de la Chine. Mon propos : il est possible que la Chine soit le seul pays capable d’intervenir avec assez de force pour contrer les tendances actuelles vers la catastrophe, cela en raison de l’absence dans la gouvernance de ce pays d’un système démocratique susceptible de paralyser, effectivement, une intervention vigoureuse dans d’autres pays, démocratiques, comme les États-Unis ou l’Inde, voire de l’Union européenne. Le propos de l’intervieweur : il aimerait mieux voir l’humanité disparaître que de la voir survivre sans la démocratie.

Comme en 2012, ce litige ne s’est pas discuté pendant l’entrevue et seulement brièvement après. En prenant conscience, finalement, de la profondeur de sa réaction – il a tout simplement effacé toute référence à l’entrevue – , j’étais déstabilisé pendant un certain temps. Son propos résonnait avec celui de Patrick Henry, paradigmatique pendant mon enfance aux États-Unis : «Give me liberty or give me death». L’expérience a stimulé une nouvelle réflexion personnelle sur les enjeux écologiques auxquels nous faisons face, enjeux incluant l’avenir de la civilisation et, à la limite, de l’espèce humaine.

Démocratie, humanité, planète

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Le «développement durable» au sein du gouvernement : la confusion est totale

Aperçu de ce long texte: L’histoire du discours sur le développement durable au sein du gouvernement arrive à une sorte d’aboutissement qui frôle le ridicule. Alors que la Loi sur le développement durable est une de quatre lois cadres du corpus québécois, elle est mise en œuvre par le petit ministère de l’Environnement et un Committee interministériel sur le DD où plus d’une centaine d’organismes du gouvernement cherche à éviter que des engagements n’interfèrent avec leurs activités conçues sous d’autres auspices. Après une première Stratégie de DD presque gênante, voilà que le gouvernement est à la veille de l’adoption d’une deuxième. Clé de la démarche : aucun résultat, aucun engagement quantifié qui compromettrait l’indépendance du Conseil exécutif à procéder aux «vraies affaires», le développement économique on ne peut plus traditionnel dans sa conception et ses démarches. Le malheur est que l’énorme travail administratif impliqué détourne l’attention, de façon voulue, des dérapages des gouvernements successifs en ce qui concerne le développement qu’il nous faut absolument mieux planifier.

En 1987-1989, j’étais membre de la première Table ronde sur l’environnement et l’économie que le ministre Lincoln a réussi à faire créer, cela suite à la fin des travaux de la Commission Brundtland. Il était intéressant de noter ce qui semblait être le peu d’emprise sur le gouvernement des trois ministres gouvernementaux qui y siégeaient. C’était néanmoins une expérience valable, mettant en lien des représentants du secteur privé, du gouvernement ainsi que des ONG (le siège réservé à un autochtone n’a jamais été occupé).

Quand j’étais sous-ministre adjoint (au développement durable…) en 1991-1992, j’ai créé le Comité interministériel de développement durable (CIDD), regroupant une quinzaine de ministères. L’objectif était de mettre en place un système permettant de coordonner les activités au sein du gouvernement qui avaient une influence sur les processus de développement mis en œuvre ou encadrés par le gouvernement. Dès le début, il était évident que chaque ministère cherchait à mettre de l’avant ses bons projets, ceux qu’il croyait contibuaient déjà au développement durable. Dubai tourEn complément à cette démarche à l’interne, j’étais secrétaire de la deuxième Table ronde québécoise sur l’environnement et le développement (lire : sur le développement durable). La Table était présidée par le ministre de l’Environnement, et les représentants du gouvernement s’y trouvaient minoritaires. Quand c’était clair que l’avenir de cette Table était plus que compromis, j’ai démissionné.

La Table n’existait plus depuis longtemps, mais le CIDD était toujours en place quand j’étais Commissaire au développement durable, en 2007-2008. Il était responsable, avec un petit secrétariat au ministère de l’Environnement, de la mise en œuvre au sein du gouvernement de la Loi sur le développement durable (LDD) de 2006 et la conception et la mise en œuvre de la Stratégie gouvernementale de développement durable (SGDD). Encore une fois, il était plus que clair que les «intérêts» des organismes gouvernementaux primaient sur la reconnaissance des défis du développement, défis qui méritaient la reconnaissance de crises.

J’en ai déjà parlé, et même à plusieur reprises, tellement l’histoire du «développement durable» au Québec est bâclée depuis ses origines prometteusses dans le temps du ministre Clifford Lincoln, à la sortie du rapport de la Commission Brundtland. L’histoire continue, mais elle est rendue aujourd’hui dans une situation ridicule tellement on a réussi à mettre le dossier sur la voie d’évitement, aboutissement des constats de faiblesse tout au long de l’histoire.

Une stratégie de développement «vraie», et l’autre (suite…)

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La fin de la croissance selon La Presse

Alain Dubuc débute sa chronique «Dire non à la croissance?» du 2 février, sur le dossier que La Presse a présenté pendant les trois jours précédents et portant sur la fin (possible) de la croissance, en disant : «L’expérience du passé a montré que notre modèle économique, quand il arrive a une impasse, réussit à se redéfinir.» Bref, le travail était plutôt une perte de temps, même s’il avoue que réfléchir sur de tels sujets n’est pas inutile. Son jugement n’est presque pas surprenant, puisque le thème qu’il y identifie n’est pas celui de «l’impasse» constituée par l’apparente fin de la croissance. Le thème qu’il identifie est la décroissance, et voilà un motif pour des réticentes importantes: «Peut-on tourner le dos à la croissance économique, changer de modèle et imaginer un système qui repose surtout sur une décroissance voulue et planifiée?» Ce thème était celui couvert par Hélène Baril dans le premier volet de l’exercice, qui reprend celui, vieux de plus de vingt ans en France, de la «décroissance voulue et planifiée», qui traîne en Europe justement parce que l’idée d’aborder l’impasse par une approche éthique élimine d’emblée toute possibilité qu’elle soit prise au sérieux par les décideurs – et par les journalistes qui les couvrent, en trop grande partie.

Gadrey graphique PIB et satisfaction de vie ii09

La fin de la croissance?

Le volet couvert par Baril est de loin le plus sérieux des trois, fournissant de l’information sur différentes mesures du bien-être et citant Robert Kennedy dans son commentaire sur le PIB à l’effet qu’«il mesure tout, sauf ce qui fait que la vie vaut d’être vécue». Ce volet termine avec des listes disparates des bienfaits de la croissance – tout ce qui est bien dans la société – , et de ses dérives, dont on parle depuis des lustres : surconsommation, congestion routière (c’est-à-dire engouement personnel et économique pour l’automobile, parmi les moteurs de l’économie), pollution de l’air et de l’eau (des cibles du mouvement environnemental depuis des décennies). Résonnant curieusement dans la liste par ce qu’il touche à l’impasse, l’endettement : «Pour alimenter la croissance économique, le crédit s’est répandu et les ménages ont été encouragés à s’endetter pour s’acheter une maison, une voiture et des biens de consommation courante. Aujourd’hui, le taux d’endettement des ménages au Canada atteint plus de 160% de leurs revenus après impôt et paiements d’intérêts.» 

Même les entrevues permettent d’éviter les enjeux de fond, celle avec Yves-Marie Abraham fonçant sur le thème de la décroissance programmée et celle avec Éric Pineault terminant avec ce dernier insistant sur la nécessité de la croissance, porte ouverte pour Alain Dubuc, qui fonce dedans. (suite…)

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Malthusiens et Cornucopiens face à l’avenir (proche et lointain)

Long article couvrant plusieurs interventions récentes en matière d’énergie dans un contexte de questionnement sur une transition qui vient, ou qui ne vient pas. Trois d’entre elles ciblent une abondance perceptible dans le domaine de l’énergie : un rapport spécial de The Economist; les conseils en finance de Jeremy Grantham; Jeremy Rifkin et la société de collaboration en émergence. Les trois sont impressionnés par les énormes progrès dans les technologies touchant les énergies renouvelables, surtout la solaire. Rifkin et Grantham soulignent d’importants risques associés à la vison d’abondance. Finalement, ces interventions négligent toutes la question de rendement énergétique et les énormes investissements requis (avec de l’énergie fossile) pour fournir les infrastructures nécessaires pour la transition vers une nouvelle société.

Il est assez impressionnant de voir jusqu’à quel point les objectifs mis de l’avant par le mouvement environnemental pendant des décennies ont maintenant la cote. On voit ceci avec l’adhésion à l’économie verte par l’ensemble des institutions internationales, par une reconnaissance des crises environnementales longtemps l’objet de déni (et qui continuent à croître en raison du dysfonctionnement du système économique actuel). De façon plus ciblée, on le voit par la reconnaissance de la nécessité de comptabiliser les externalités et par l’envol des interventions en matière d’énergie renouvelable. On n’a qu’à suivre la revue de presse Enjeux énergies et environnement pour voir l’envergure de ce dernier aspect de la situation.

Depuis la publication de mon dernier article, j’ai revisité la question de la baisse du prix du pétrole avec une mise à jour du travail de Jeremy Grantham, financier américain associé à GMO dont j’ai utilisé les analyses dans l’article qui a débuté ce blogue, où il a souligné une tendance permanente à la hausse pour le prix des commodités. J’étais en même temps en train de finir The Zero Marginal Cost Society : The Internet of Things, the Collaborative Commons and the Eclipse of Capitalism, le plus récent livre de Jeremy Rifkin. Finalement, j’ai consulté un rapport spécial sur l’énergie et la technologie (17 janvier 2015) du magazine britannique The Economist qui couvre un ensemble de tendances actuelles dans le secteur de l’énergie: technologies des énergies renouvelables; de nouveaux modèles d’affaires qui ciblent la gestion de la demande; efficacité énergétique; perspectives pour l’Afrique.

Abondance ou contraintes?[1]

The Economist, fidèle à ses orientations de base manifestes dans d’autres rapports spéciaux et dans le magazine en général, voit dans ces tendances des perspectives qui lui permettent de croire que le système lui-même n’est pas en danger, que des innovations technologiques en ce qui concerne les énergies renouvelables permettront peut-être d’éviter la catastrophe. On sent comme contexte pour le rapport la reconnaissance par les Européens des défis critiques en matière d’énergie : nucléaire vieillissante, dépendance envers la Russie pour le gaz, absence de gisements de pétrole (la Mer du Nord étant en déclin), gisements de charbon qui ne répondent plus aux exigences environnementales minimales. (suite…)

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Derrière le prix du pétrole

Tout effort de comprendre ce qui se passe actuellement avec le prix du pétrole doit se situer dans les tendances long terme dont il est question assez souvent dans mes articles, et cela comporte une prise en compte de (i) les réserves actuelles et (ii) le prix de leur exploitation. De plus, il faut situer les analyses de ce qui occasionne cette baisse de prix dans le contexte plus général, la dépendance des économies du monde au pétrole et les perspectives de transition.

Dans leur livre de 2012 Drilling Down: The Gulf Oil Debacle and Our Energy Dilemma, Joseph Tainter et Tadeusz Patzek fournissent des images de la situation en se fiant à l’Agence internationale de l’énergie (AIÉ) pour les données et les projections.

Tainter-Patzek p.40 5

 

Ce graphique permet de situer ce qui se passe aujourd’hui : les producteurs actuels (le bleu foncé) vont voir leurs réserves décliner sensiblement d’ici 2030 – dans seulement 15 ans – et pendant cette période il va falloir trouver, contre toute l’expérience des dernières décennies, de nouveaux gisements (le bleu pâle) pouvant produire en 2030 l’équivalent du pétrole conventionnel produit aujourd’hui. Le graphique distingue entre la production de pétrole conventionnel et non conventionnel, mais le conventionnel inclurait les gisements en eau profonde (comme Deepwater Horizon de BP) et le non conventionnel est représenté par le pétrole de schiste et les sables bitumineux (le vert). Les pays producteurs comme l’Arabie saoudite épuiseront une bonne partie de leurs réserves pendant la période.

Tainter et Patzek fournissent une image complémentaire à la première pour souligner l’importance du défi: les lignes horizontales représentent d’importantes sources actuelles de pétrole; les courbes donnent une indication de la production requise pour compenser le déclin de la production venant des réserves actuelles : (suite…)

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La Chine, l’Inde – et l’Afrique

Lors de mon troisième voyage en Chine, en 2011, j’étais accompagné par une nièce très intéressée par les questions de développement international. L’an dernier, elle a poursuivi un intérêt de longue date et a fait un voyage en Inde. Tout récemment, une autre nièce qui suit mes pérégrinations m’a donné en cadeau un livre, Lumières d’Afrique, de la journaliste de la Société Radio-Canada (SRC) Sophie Langlois. Cette nièce ne comprenait pas mon intérêt pour la Chine, et proposait que je visite d’autres pays, pourquoi pas, en Afrique.

Démographie

 

Critères de choix pour un voyage

J’ai eu le privilège de visiter un bon nombre de pays, au fil des années, et l’expérience a été très enrichissante. Depuis un certain temps, je voyage moins, et avec une bonne dose de culpabilité, sachant que les émissions qui y sont associées sont très importantes. Je me suis déjà formulé une approche de triage théorique face à la situation, classant l’Inde, avec sa démographie hors de contrôle, et l’Afrique, avec ses incapacités généralisées, comme des régions du monde où il n’y pas d’espoir pour une gestion de la transition qui va s’imposer face aux effondrements qui s’annoncent.

Des lectures sur l’Inde l’été dernier en suivant l’expérience de ma nièce ont bien enraciné mes perceptions de ce pays où la vaste majorité de la population vit dans la pauvreté plutôt absolue et où le nombre des pauvres va augmenter par des centaines de millions dans les prochaines années (augmentation nette de 20 millions par année). Comme ailleurs, une petite proportion de la population participe à la vie des pays riches, mais les perturbations susceptibles de venir des inégalités grossières mettent cette vie à risque. J’ai donc lu avec intérêt le livre sur l’Afrique, illustré par de superbes photos du conjoint de Langlois, Normand Blouin. J’avais déjà visité le Kenya, suite à l’écoute d’une entrevue suggérant qu’en raison surtout de la croissance démographique de ce pays (et de la Tanzanie), sa grande faune risque de disparaître d’ici peut-être vingt ans. J’avais également visité à deux reprises Madagascar (pas tout à fait sur le continent…) dans un effort sans succès de développer des projets ciblant la conservation de la biodiversité endémique et en péril de cette île. Avec mon épouse, j’ai aussi visité le Maroc, histoire de me tremper quelque temps dans un pays musulman (pour une réflexion complémentaire à celle de cet article, cliquer sur la carte).

Et l’Afrique – sub-Saharienne

Le livre a réussi à stimuler une nouvelle réflexion sur l’idée de (re)visiter ce continent. Le livre présente ce que Langlois appelle des «histoires méconnues», alimentée par les reportages qu’elle a faits pendant son mandat couvrant plusieurs années, avec base au Sénégal, et par des sélections de son blogue écrites pendant ce temps. Les histoires sont souvent émouvantes, mettant en évidence l’énorme souffrance des habitants de nombreux pays africains. Le livre termine avec une réflexion par Langlois sur l’aide humanitaire qui n’a pas réussi à gérer ce défi au fil des décennies, du colonialisme d’abord, de l’impérialisme économique des pays riches (et maintenant de la Chine) ensuite. (suite…)

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Boules de cristal pour mieux savoir, mieux décider?

Résumé: Les prévisions économiques sont largement reconnues comme peu fiables, même si les décideurs s’y fient souvent. L’idée d’un bilan de ces prévisions pour 2014 n’est peut-être donc pas géniale. Reste que les journalistes dans le secteur font beaucoup plus que le jeu de prévisions. Ceux du Devoir ont souligné en début d’année la faiblesse des attentes pour la croissance économique. Par la suite, ils ont noté que des éléments structurels de l’économie font que nous ne devons presque plus nous fier au PIB comme indicateur, et la croissance comme objectif. L’élection d’un gouvernement libéral, avec son équipe économique, a fourni l’occasion de souligner de nouveau les défis face à des promesses jugées jovialistes. Un regard sur des constats similaires à l’échelle des institutions internationales finit par faire d’une «nostalgie de croissance» presque le thème de l’année. La question devient alors comment gérer les défis, comment faire face intelligemment aux risques identifiés par le Forum économique mondial de Davos. Plusieurs citations fournissent matière à réflexion, tout comme les articles eux-mêmes.

Au début de l’année 2014 je me suis occupé à inscrire pour relecture en fin d’année des textes de trois journalistes en économie du Devoir, les journalistes étant parmi nos meilleures sources de perspectives sur la situation économique de la province, du pays, voire de la planète. Je notais depuis longtemps ce qui semblait être une tendance de la part des journalistes en général à se tromper dans leurs projections et je me suis dit que j’allais vérifier pour une fois, tout en recherchant – surtout – matière à réflexion en fonction du recul fourni par une année passée. Les textes que j’avais retenus pour relecture dataient du 4 janvier au 15 février, et la nouvelle période de réflexions similaires débute ces jours-ci pour 2015. Je comprenais bien qu’un recueil de texte de La Presse fournirait un portrait sensiblement différent.DSC02538

À la relecture de ces textes, ma réaction est tout autre que la recherche d’une validation des quelques prévisions qui s’y trouvent. Je suis devant ce qui est presque un roman, une série de textes écrits dans un cadre qui les définit tous, une réflexion sur le modèle économique en difficulté «temporaire» que les textes cherchent à mettre à jour, en essayant de mieux voir notre situation.

Éric Desrosiers rejette les comparaisons trop faciles avec des situations antérieures dès le départ, tout en ciblant de façon fascinante la tendance à la multiplication «d’enchaînements d’événements inattendus» (et il donne comme exemples de possibilités «une maladie infectieuse [qui] peut franchir des milliers de kilomètres en quelques heures seulement, [ou] la découverte et l’exploitation d’une nouvelle ressource d’énergie aux États-Unis [qui] pourraient, éventuellement, accélérer des changements politiques au Moyen-Orient» – pas pire comme « prévisions» !).

Prévisions court terme

Dans les textes que j’avais retenus, les prévisions sont finalement peu nombreuses. Parmi eux, un reportage sur les prévisions de la Banque mondiale par Desrosiers qui suggèrent «qu’une véritable reprise économique est en cours dans les pays à revenu élevé», surtout les États-Unis, où une croissance du PIB de 2,8% est prévue; la zone euro connaîtrait une croissance de 1,1% et l’économie mondiale de 3,4%. Dans un autre reportage, Gérard Bérubé couvre les prévisions du Mouvement Desjardins pour le Québec, selon qui la croissance serait de 1,8%, venant surtout des exportations, surtout aux États-Unis; le Canada connaîtrait une croissance de 2,3% et le dollar canadien serait à 94 ¢US à la fin de 2014. (suite…)

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Le dossier Résolu: Notre foresterie n’est tout simplement pas rentable selon les normes requises

Le débat actuel sur les activités d’exploitation forestière de la compagnie Produits forestiers Résolu est intéressant, mais comme c’est le cas depuis des décennies, il semble manquer un élément primordial. Le bas de vignette de la photo dans la réplique du pdg de Résolu dans Le Devoir du vendredi 19 décembre met la table : «Le Québec peut se montrer très fier des résultats obtenus par son industrie forestière». Il n’est pas évident qui est responsable de ce constat, mais il cache une multitude de problématiques.

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La «boîte noire» du ministère des Ressources naturelles

Dans mon travail sur l’Indice de progrès véritable (IPV), je cherchais des données pour le calcul du coût des externalités de nos activités économiques dans différents secteurs. Je n’ai pas trouvé de meilleure source que les données du ministère des Ressources naturelles du Québec (MRN) pour le secteur forestier, données abondantes et traitées par deux programmes développés par des instituts de recherche du secteur, FÉRIC et FORINTEK. Les représentants de l’industrie réfèrent à ce travail du Ministère comme une «boîte noire», sans jamais fournir les critiques implicites dans cette description. Les responsables gouvernementaux, à ma connaissance, n’ont jamais élucidé leur utilisation des deux modèles pour expliquer les publications faites chaque année qui en montrent les résultats de leur application, même si une présentation à la Commission Coulombe en 2004 en a fourni quelques pistes. Les milieux universitaires semblent reconnaître la possibilité de certaines faiblesses dans le travail, mais en même temps une concordance entre ce travail et leurs propres constats quant aux enjeux du secteur.

Comme je conclus dans le chapitre du livre consacré au secteur forestier, à moins que les données du MRN et les modèles informatiques qu’il utilise ne soient tout simplement erronées, l’exploitation de nos forêts se fait à perte sur la très grande majorité des parterres de coupe. À toutes fins pratiques, la forêt est donnée aux exploitants, et l’activité y est maintenue par la volonté des gouvernements successifs de préserver des emplois dans les régions ressources, alors que toute l’histoire de ces régions est bâtie sur l’exploitation forestière, cela remontant aux origines de la colonie.

Le débat actuel se confronte donc aux constats généraux découlant du calcul de l’IPV. De toute évidence, ceux-ci s’insèrent dans les travaux du Club de Rome dans Halte à la croissance insistant sur la nécessité de prendre en compte l’ensemble des facteurs de notre développement, et la vision d’ensemble que cela fournit. Suivant une telle approche, ni la foresterie, ni l’agriculture, ni l’exploitation minière ne représente au Québec une activité économique dans un sens acceptable.

L’exploitation de nos ressources naturelles n’est pas une activité économique

La foresterie maintient des milliers de personnes au travail, résultat de décisions politiques qui peuvent bien se justifier, mais non pas en fonction de paramètres économiques. Il s’agit d’une approche au développement qui cherche à concilier occupation du territoire par des communautés qui y sont ancrées, exploitation des ressources naturelles renouvelables dans le but d’apporter des bénéfices à ces communautés et maintien des conditions qui rendent ces deux objectifs possibles. (suite…)

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