Mobilité durable: Les enjeux écologiques

Nos comportements ne l’indiquent pas, mais ce sont nos transports qui occasionnent les plus importantes quantités d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Ceux-ci à leur tour sont associés directement aux perturbations des systèmes atmosphères que nous connaissons comme les changements climatiques. Le secteur manufacturier de bon nombre de pays riches est fondé sur la production de véhicules de transport; suivant le modèle des pays riches, la Chine se propose d’en faire le « moteur » de son développement économique pour les prochaines décennies. Toute cette activité est intimement liée à l’industrie pétrolière, pour laquelle les transports représentent le plus important segment de marché. Dix des douzes plus importantes entreprises mondiales sont dans les secteurs de l’énergie fossile et de l’automobile, sur la liste du Fortune 500.

C’est dans un tel contexte qu’on vise ce qu’il est convenu d’appeler la «mobilité durable». La distinction est importante : la mobilité n’équivaut pas au transport, et tout l’avenir des milieux urbains à l’avenir va devoir refléter cette distinction. Il n’y aura vraisemblablement pas de «transport durable», mais il faut nécessairement que nous trouvions des modalités pour une «mobilité durable», puisque la survie de bon nombre dépend de leur mode de vie en ville. L’Observatoire de mobilité durable de l’Université de Montréal alimente la réflexion sur les multiples enjeux en cause, dont un article par Beaudet et Wolff qui situe le cadre pour la réflexion.

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Depuis plus de deux ans, l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) travaille sur les différentes facettes d’une vision de mobilité durable conçue en fonction d’orientations économiques. Le plus récent rapport de recherche de l’IRÉC s’intitule justement «Politique industrielle : stratégie pour une grappe de mobilité durable». L’IRÉC analyse les transformations à venir dans les secteurs de l’énergie et des transports, et insiste sur l’idée que sa contribution constitue un programme pour la «reconversion écologique de l’économie». L’IRÉC prétend même que ses propositions contribueraient à une « économie verte ». Malheureusement, son approche ne tient tout simplement pas compte des véritables enjeux écologiques en cause.

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Avenir du secteur forestier

L’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec a tenu un atelier le 20 mars pour débattre de la rentabilité http://www.harveymead.org/2013/03/21/avenir-du-secteur-forestier/http://www.harveymead.org/2013/03/21/avenir-du-secteur-forestier/des investissements sylvicoles. Dans un contexte de grande préoccupation pour l’avenir de l’industrie, autant au niveau de la foresterie elle-même que de celui des scieries et des usines de pâtes et papiers, plusieurs interventions ont été faites pour fournir un portrait de la situation en forêt privée.  Une intervention en après-midi a précédé la mienneDiapositive01portant sur des travaux de planification sylvicole dans la Mauricie, en forêt publique, elle a insisté sur « l’indicateur économique » comme la référence clé pour la réflexion. En effet, le principal thème de la journée a été la primauté de la valeur sur le volume.

Mon intervention cherchait à souligner un contexte économique qui ne semble pas souvent pris en compte, défini par la « boîte noire » du MRN. Elle portait sur la redevance recherchée par l’État pour l’accès à la ressource publique que constitue la forêt en vue de son exploitation; un court résume en fournit les principaux éléments. Les données suggèrent que cette ressource est donnée par le MRN, fournissant à peine des revenus suffisants pour couvrir les coûts du programme de traitements sylvicoles dont l’objectif est d’assurer la pérennité de la forêt, en principe renouvelable. Clé dans le portrait, les coûts du transport dans la forêt publique représentent entre 40% et 70% de l’ensemble des coûts, en fonction d’une distance à la scierie de 164 kilomètres en moyenne, contre 51 dans la forêt privée. Comme dans tous les secteurs de développement, la hausse plus que prévisible du prix du pétrole dans les prochaines années est difficile à concilier avec le maintien du système d’exploitation commerciale en place, devant l’importance des coûts du transports dans le portrait.

Il s’agit, finalement, d’une présentation du travail sur le chapitre 2 du livre sur l’IPV.

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Développement durable: trop tard

Le comité du Québec du Groupe interministériel sur le développement durable du gouvernement fédéral a tenu son atelier biennal le 19 mars dernier à Montréal. Formé en 1995 et composé de cadres, surtout du secteur de l’environnement des différents ministères, le groupe a proposé comme thème « Le développement durable en période de transformation ». Diapositive1La présentation du Commissaire à l’environnement et au développement durable (CEDD), qui quitte son poste à la fin de mars, a permis de réfléchir sur le peu de progrès en la matière depuis la création du poste il y a 17 ans, tout en signalant la façon dont le gouvernement fédéral a réussi à placer l’ensemble de cet engagement sous la responsabilité d’une «agence non centrale», le ministère de l’Environnement. Il est désolant est de voir que le gouvernement provincial a suivi ce modèle, mettant la responsabilité pour la mise en oeuvre globale de la Loi sur le développement durable, sous la responsabilité de son agence non centrale, le ministère de l’Environnement.

Comme au fédéral, le Commissaire provincial relève du Vérificateur général, sous le nom de Commissaire au développement durable. Il faut noter que le CEDD par intérim Ron Thompson a signalé dans deux rapports, en 2007 et 2008, le peu d’écoute de la part du gouvernement fédéral des rapports précédents s’étalant sur 10 ans. Rien ne suggère que cette situation a changé pendant les cinq dernières années. Le Groupe fédéral, de par sa composition, souligne le détournement de l’attention des défis du développement lui-même en cherchant à résumer cela sous la rubrique de l’environnement – le nom même du CEDD souligne la confusion, prétendant distinguer l’environnement du développement (durable ou non).

J’ai déjà souligné dans un article récent les faiblesses qu’il faut noter face aux rapports des vérificateurs généraux (dont ceux des commissaires), faiblesses auxquelles je reviens régulièrement dans ce blogue. Dans ma présentation à l’atelier, je propose que le concept même de « développement durable » appartient désormais au passé, les quelque trois décennies pendant lesquelles nous avons essayé de promouvoir une intégration des enjeux sociaux, économiques et environnementaux ayant, finalement, abouti à un constat d’échec.

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Deuxième moitié de l’ère des métaux?

Au Forum sur les redevances minières tenu le 15 mars aux HEC, il était intéressant de voir se dérouler un débat assez vif mais manquant vraiment de contexte. La vérification de l’activité minière du coté gouvernemental que j’ai faite en 2008 comme Commissaire nous a fait découvrir que ni le MRN ni le ministère des Finances ne se posait la question pour laquelle nous cherchions une réponse : De quelle façon le développement minier s’insère-t-il dans la recherche du bien commun de la société? Dominic Champagne est intervenu pour poser la même question lors du Forum, et c’était encore difficile de voir un portrait global raisonnable se dessiner en réponse.DSC07580

Finalement, le Forum était un exercice qui rappellait celui de 2008, mais dont ce petit rapport de vérification arrive à un constat plus général. Tous les intervenants de l’industrie soulignaient que le secteur connaît globalement aujourd’hui (i) des hausses de coûts, (ii) des baisses de teneur dans les gisements, (iii) un accès de plus en plus difficile à ces gisements et (iv) des hausses de prix. Ce sont justement ces caractéristiques qui définissent, dans le secteur énergétique, les combustibles non conventionnels qui dominent le portrait désormais. Ces ressources marquent ce que l’on appelle « la deuxième moitié de l’ère du pétrole », qui nous met devant des défis énormes. (suite…)

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Dérives énergétiques

Encore Découverte, qui présentait le 3 mars un reportage sur les gisements de pétrole de schiste au Québec. Pendant quatre minutes Charles Tisseyre fait un plaidoyer pour l’exploitation de cette ressource. Il serait difficile pour quiconque, dit-il, de renoncer à la fortune qu’offrent les gisements; ceux qui voudront protéger l’Île d’Anticosti « devront avoir de bons arguments », comme si le défi des changements climatiques appartenait à un autre discours. Il termine en moins d’une minute pour souligner sur un ton dramatique: que l’économie mondiale carbure sur les combustibles fossiles et c’est comme si l’humanité n’a rien fait pour encadrer cette économie face au désastre appréhendé.

Tisseyre se joint ainsi à un discours largement répandu qui voit les réserves des combustibles non conventionnels comme une sorte d’El dorado inespéré. Le discours est terriblement incomplet et finalement trompeur. J. David Hughes a récemment publié un rapport sur ces combustibles qui mérite lecture par quiconque cherche à comprendre le discours et ses défaillances. Hughes graphique 2 partieCe n’est même pas l’absence de prise en compte des changements climatiques qui importe ici. Les combustibles non conventionnels le sont parce qu’ils définissent en quelque sorte la deuxième moitié de l’ère du pétrole, dans laquelle nous nous trouvons. Ils arrivent sur la scène aujourd’hui parce que leur exploitation, et les technologies (dont la fracturation hydraulique, ou «fracking») qui la rendent possible, coûtent très cher, sont très énergivores et nécessitent un prix élevé du pétrole. Les gisements aux États-Unis atteindront leur pic vers 2017 et un effondrement vers 2019; comme dit Hughes, il s’agit d’une bulle d’une durée d’environ 10 ans, et ne suggère rien pour le long terme. Il ne s’agit pas d’une production semblable à celle de l’Arabie Saoudite, où les gisements produisaient sans de coûteuses interventions annuelles. Simplement pour maintenir la production de gaz et de pétrole de schiste aux États-Unis à leur niveau actuel, il faut forer annuellement environ 8600 puits chaque année, à un coût de $48 milliards, surtout dans les deux principaux gisements, dont le Bakken.

En contrepartie, les projections de l’Energy Information Administration (EIA) des États-Unis découlent de perspectives économiques qu’elle juge incontournables et de la demande pour l’énergie qui en découle. Le graphique de Hughes reproduit ici illustre la grossière incohérence entre de telles projections et la réalité. En dépit de l’arrivée du pic de pétrole (conventionnel), ces projections pour la consommation mondiale d’énergie prévoient une augmentation de 44% de celle-ci entre 2011 et 2035, période pendant laquelle la population augmentera de 23% et la consommation par personne de 14%. Pour soutenir cette croissance, il faudra l’équivalent de 71% de tous les combustibles fossiles consommés entre 1850 et 2011 – dans 24 ans… Les « réserves » non conventionnelles paraissent énormes, mais seule une petite fraction de celles-ci sera récupérable. Découverte suggère que seulement 5% du pétrole de schiste d’Anticosti pourra être éventuellement exploité, indication générale pour l’ensemble de ces réserves.

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Boum minier, un piège?

Soixante années de développement ont livré aux pays riches un niveau de vie qui est l’envie de l’humanité. Elles ont par contre progressivement manifesté, à travers le temps, des crises environnementales et sociales croissantes. L’empreinte écologique fournit une première mesure de ces crises en indiquant que nos dépassons par trois fois la capacité de la planète à soutenir notre activité au Québec.

Le PIB que nous utilisons comme guide pour une bonne partie de nos choix politiques ne mesure pas ces crises. Les économistes écologiques proposent le recours à l’Indice de progrès véritable, qui part de notre expérience positive des dernières décennies, refletée par la partie du PIB qui mesure notre consommation, mais en soustrait le coût de ce qui la permet en termes de ressources ainsi que de milieux pour la disposition de nos déchets. L‘IPV représente l’établissement d’un bilan des actifs et des passifs du développement dont l’objectif devrait être reconnu par tous.

Pour le Québec, le calcul de cet IPV suggère que le PIB surestime notre « bonheur » par un facteur de trois. L’empreinte et l’IPV reconnaissent donc les « effets pervers » de notre activité économique et, à sa base, de notre surconsommation. C’est dans un tel contexte qu’il faut aborder les débats en cours sur la façon de gérer ce qui semble être un « boum minier » et un potentiel important pour le développement économique fondé sur les ressources non renouvelables.

Approche au « boum minier »

Expéditions de cuivreOn peut comprendre une partie du défi en cause en pensant à ce que nous avons fait avec le cuivre, dont la production a diminé de 83 % avec l’épuisement des gisements, une situation qui a abouti au lancement d’un Plan Cuivre . Ou bien nous procédons comme beaucoup l’ont fait, en présumant qu’il y aura toujours d’autres ressources que nous n’aurons qu’à trouver, ou bien nous procédons en reconnaissant que nous allons épuiser nos réserves et nous trouver appauvris par après. Pour une multitude de raisons, c’est presque de l’inconscience que de procéder selon la première approche.

En prenant la deuxième approche, nous devons oublier donc l’idée que l’activité générée par l’exploitation suffit à répondre à nos besoins et se justifie ainsi. Elle va terminer, et pour mieux saisir l’importance d’une telle situation, nous n’avons qu’à regarder la frénésie avec laquelle tous cherchent aujourd’hui de nouvelles réserves de pétrole et de gaz – et de métaux. Nous avons exploité d’abord les gisements riches et faciles d’accès, et sans avoir préparé l’événement, nous nous trouvons aujourd’hui avec un prix pour les ressources non renouvelables « non conventionnelles » qui réflète la rareté croissante des réserves conventionnelles. L’accent est toujours sur les ressources énergétiques, mais les réserves des métaux deviennent de plus en plus non conventionnelles aussi. Ce prix élevé gruge directement dans notre capacité de faire autre chose, de continuer à maintenir notre bien-être. (suite…)

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La crédibilité des vérifications et des audits mise en question

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Surprenante cette intervention de spécialistes qui met en question certains dogmes face aux audits dans le secteur public. Avec le titre « L’audit dans le secteur public : le risque d’une illusion de contrôle » dans Le Devoir du 12 février 2013, les auteurs mettent l’accent sur la grande qualité des vérifications, la documentation rigoureuse de tout constat fait, et sur la faiblesse que cela souligne, l’incapacité de mettre en évidence ce qui n’est pas ainsi documenté. Ils critiquent avec raison le fait que le risque d’illusion de contrôle par les audits « est entretenu par une certaine obstination de la part des dirigeants politiques à ne pas vouloir reconnaître les limites de l’audit ». Les rapports du VG, pour prendre cet auditeur, donnent « une impression de sécurité, de transparence et de crédibilité », mais les révélations de la Commission Charbonneau suffisent « pour réaliser avec lucidité que les promesses liées à l’audit dans le secteur public sont menacées de se transformer en illusion ».

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En foresterie, la limite nordique actuelle n’est déjà pas une limite rentable

Pendant les années 1990, le ministère des Ressources naturelles a identifié une «limite nordique» définissant l’extension DSC04879maximale de l’exploitation forestière. Il le faisait dans un cadre ciblant le respect d’objectifs écologiques, soit la capacité de croissance productive et de régénération des forêts après coupe. Lors d’une émission de Découverte le dimanche 20 janvier dernier, des chercheurs en foresterie de l’Université du Québec à Chicoutimi UQAC) sont intervenus pour promouvoir des projets d’extension de la limite nordique bien plus au nord que la limite actuelle.

Ces interventions sont surprenantes, même si elles se font dans un contexte où l’UQAC est reconnue généralement pour des interventions en ce sens. Lors de l’émission, la présentation par l’ensemble des intervenants de phénomènes de changements dans les écosystèmes de la taïga, aux limites de la forêt boréale, était convaincante. Ce qui l’était moins, voire pas du tout, était la prétention des chercheurs du Centre de recherche sur la Boréalie et du Consortium de recherche sur la forêt boréale commerciale, à l’encontre de l’avis des autres, qu’il faut (i) arrêter la progression de la taïga vers le sud et (ii) transformer les éclaircies de la forêt boréale par des plantations. Une absence fondamentale d’analyse économique marquait ces propositions.

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Stabilisation de la population

À travers les nombreux bilans qui cherchent constamment à expliquer la faible croissance dans les pays richesDSC01677 et l’absence de reprise, on voit poindre souvent une sorte de nostalgie pour l’époque des baby-boomers. C’était une époque où la croissance démographique alimentait la croissance économique que tous suivaient, et qui semblait, tout au long des Trente glorieuses, créer une richesse impressionnante. Les économistes suivaient le PIB comme indicateur de cette croissance, et regardaient dans le rétroviseur les rapports de plus en plus fréquents sur quelques problèmes écologiques qui semblaient en résulter.

Il me paraît pertinent de ressusciter un texte que j’ai écrit en lisant l’éditorial de Jean-Robert Sansfaçon dans Le Devoir du 10 février dernier. Il n’y a pas de raison de croire que le Québec, voire l’ensemble des pays riches, vont retourner à l’époque des baby-boomers et reprendre une croissance démographique contre presque toutes les tendances actuelles. Par contre, on voit partout une sorte de réflexe bien ancré qui voit dans l’immigration le salut.

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Fin de la croissance

La chronique d’Éric Desrosiers dans Le Devoir cette semaine portait sur «la fin de la croissance ». Il faisait allusion à un rapport produit par Robert Gordon du National Bureau of Economic Research intitulé «Is U.S. Economic Growth Over? Faltering Innovation Confronts the Six Headwinds» » À première vue, et après lecture de la chronique, le rapport semble soutenir les préoccupations quant aux limites à la croissance inhérentes dans sa dépendance aux facteurs naturels, aux écosystèmes. Il n’en est presque rien.

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